« Shooting Stars » : L’image comme regard témoin

Acclamé en 2019 par une foule de cinéphiles, Shooting Stars de la réalisatrice polonaise Magdalena Jaroszewicz se dessine comme un petit bijou du cinéma aux multiples sensations…

Étoiles filantes

Une nuit. Un quartier. Des gens. Des feux d’artifices. Ce soir, c’est la fête. Tout le monde sort dans la rue et des bruits d’éclat retentissent partout. Gare aux fiers qui ne s’éloignent pas assez des explosifs. Attention à ceux qui sont sortis dehors. Dommage pour ceux qui voulaient dormir ce soir. Du bruit, du bruit, du bruit partout. À droite, en haut, à gauche, devant, derrière. Et puis des gens aussi. À droite, en haut, à gauche, devant, derrière.

Avec un cadrage qui se concentre sur les gens et leurs émotions plutôt que sur les feux d’artifices eux-mêmes, ainsi que des bruits d’explosions omniprésents, Magdalena Jaroszewicz décrit précisément l’ambiance de cette nuit-là. La caméra est dans un immeuble, en hauteur. Elle est simplement posée. Elle est comme un spectateur, un témoin. La caméra c’est nous. D’ailleurs aucun étalonnage ne semble avoir été fait, les images sont laissées telles quelles.

Shooting stars, Magdalena Jaroszewicz (2019)

Ce qui fait la richesse de ce film, c’est l’immense liberté d’interprétation qu’il offre. L’atmosphère est à la fois bruyante et bizarrement calme. Les visages insouciants des fêtards sont inquiétants tout comme ceux, apeurés, des enfants du quartier. Une menace semble rôder. Dans la bande sonore se mêlent bombardements et rires. On dirait que c’est la guerre. Mais une guerre qui n’effraie pas tout le monde. Ce que la réalisatrice a réussi à faire, c’est donc nous mettre dans une ambiance. Peu importe si elle nous donne envie de faire la fête ou bien de se cacher. Une chose est sûre, après ces seize minutes intenses de film, le spectateur est imprégné de cette atmosphère. Difficile de revenir à notre réalité.

Découvrez l’interview de Magdalena Jaroszewicz

Écrit par Arthur Morard