Pour notre ultime interview autour du Festial Courts d’un soir, on se devait de partager avec vous notre rencontre avec la gagnante du Grand Prix Fiction, Mélanie Charbonneau. Retour sur les premiers pas d’une étoile montante du cinéma canadien.
Je nourris chaque film de mes histoires.
Bonjour Mélanie. Pour ceux et celles qui n’ont pas encore la chance de vous connaître, pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vous ?
J’ai commencé à faire des films à l’adolescence, vers l’âge de 15 ans avec ma gang de théâtre. J’avais acheté une caméra vidéo avec l’argent que j’avais gagné en ramassant des fraises. J’ai grandi à la campagne, à l’île d’Orléans. On tournait plein de niaiseries, des courts métrages, des pièces de théâtre avec des projections vidéos. Par la suite, j’ai étudié en Art et technologies des médias au Cégep de Jonquière. Après mes études, j’ai réalisé des web-séries, de la publicité, des émissions de voyage, des séries documentaires. Mais depuis cinq ans, je consacre mon temps uniquement entre faire des films et de la publicité. J’habite entre Montréal et notre maison de campagne à Lac-Brome, avec mon fiancé (qui compose la musique de mes films), mon chien et mon chat.
En 2006, vous devenez le premier talent québécois à atteindre le million de visites sur YouTube, grâce à votre vidéo humoristique L’Anti Kamasutra. Vous faisiez donc parties de ce qu’on appelle la première génération de Youtubeurs ?
On pourrait dire ça ! J’avais mis cette vidéo sur YouTube pour la partager à ma famille et mes amis(es) et en quelques jours elle est devenue virale. À l’époque, je créais beaucoup de contenus destinés pour le Web pour différents médias, magazines ou marques. Donc on peut dire que j’étais dans la première vague de créateurs de contenus.
Depuis cette première vidéo « amateur », votre vie a bien changé. Vous vous êtes retrouvée propulsée au sommet de nombreux grands festivals grâce à votre premier court métrage Seule. Comment avez-vous vécu cette ascension fulgurante ?
« Seule » a été pour moi une porte d’entrée dans l’industrie du cinéma. Avec Talent tout court, un programme de Téléfilm Canada, je suis allée le présenter au marché du film à Cannes. D’être là, de rencontrer des réalisateurs, producteurs, programmateurs de partout dans le monde, ça donne juste envie de faire des films! C’est vraiment enivrant ! « Seule » a aussi été pour moi la porte d’entrée vers le format long. C’est avec ce court métrage que j’ai aussi suscité l’intérêt de Go Films pour « Fabuleuses » . Et ce qui me fascine toujours, c’est de voir que mes films font rire des publics de partout dans le monde.
Des films, des séries web ou encore des publicités, on peut dire que vous êtes une artiste polyvalente qui aime jouer avec les genres cinématographiques ?
Chaque projet publicitaire amène son défi, que ce soit des effets visuels, des scènes d’humour, des cascades, des rigs, des hélicoptères, etc. La pub c’est mon atelier. C’est là que je pratique mon craft. Le cinéma, c’est mon monde intérieur. Je nourris chaque film de mes histoires. C’est une approche beaucoup plus personnelle. Et c’est dans mes films que j’explore, que j’invente, que j’imagine.
Votre court métrage Lunar-Orbit Rendezvous a remporté le Grand Prix Fiction au Festival Courts d’un soir de Montréal. Comment est né ce scénario de science-fiction qui mêle délicatement l’humour à la tendresse ?
Lors du festival Tribeca, j’avais vu une conférence du réalisateur Richard Linklater avec Ethan Hawke et Julie Delpy sur le processus collaboratif des films « Before Sunrise », « Before Sunset » et « Before Midgnight ». La naissance du scénario venait de la rencontre d’écriture entre les comédiens et le réalisateur. Ça m’avait beaucoup inspiré ! Avec les comédiens Noémie O’farell et Frédéric Lemay, on a commencé à se rencontrer pour brainstormer. On voulait faire un film sur une rencontre amoureuse. On trouvait que l’intimité entre deux personnes vient de la capacité à se montrer vulnérable devant l’autre. On a puisé dans nos histoires personnelles pour inventer les deux personnages. J’avais aussi envie de faire un film sous la forme d’un road movie. Et c’est Frédéric est arrivé avec l’idée de génie que ce roadtrip nous amène sur la lune, avec cette image de station-service flottante. Avec le directeur photo, Ariel Méthot, on s’est inspiré d’images du voyage sur la lune pour créer tout l’univers visuel. J’ai même intégré des conversations de la NASA dans le design sonore du film. Finalement, j’avais envie de tourner en pellicule super 16mm, chose que je n’avais jamais faite auparavant. Et cette histoire s’y prêtait à 100%.
J’aime être surprise par le scénario, que l’histoire m’amène ailleurs, qu’elle joue avec les codes du genre.
Vous êtes actuellement en train de terminer Fabuleuses, votre premier long métrage co-écrit avec Geneviève Pettersen. Comment avez-vous vécu cette première expérience dans la réalisation d’un format long ?
C’était une expérience magique ! Geneviève et les comédiennes du film sont mes amies. Nous avions déjà collaboré sur la websérie « Les Stagiaires ». C’était juste un plaisir de se retrouver à nouveau. Notre équipe était soudée et on riait tellement sur le plateau. C’est important quand on fait de la comédie, de créer un climat détendu sur le plateau, pour laisser place à l’exploration et au délire ! Et le fait de travailler avec mes proches collaborateurs (Ariel Méthot à la direction photo, Éric Barbeau à la direction artistique, Isabelle Malenfant au montage, Antoine Rochette et David Rancourt à la musique), ma petite famille de créateurs, c’est une source quotidienne d’inspiration.
Qu’est-ce qui vous attire principalement dans une œuvre cinématographique ?
D’abord les personnages. J’aime voir à l’écran des personnages uniques, hauts en couleur, différents. J’aime être surprise par le scénario, que l’histoire m’amène ailleurs, qu’elle joue avec les codes du genre. J’aime voir un(e) cinéaste qui s’amuse. Les films de la dernière année qui m’inspirent : « Woman at war », « Shoplifters », « Border », « The Favourite », « Blakkkansman ».
Si vous deviez définir votre univers en un mot, lequel serait-il ?
En fait, ce serait un émoji <3 Des films faits avec du cœur.