Interview : Nicky Naudé, à la croisée des genres

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Rencontre avec Nicky Naudé, acteur et réalisateur français qui s’illustre aussi bien dans des rôles physiques que dans des registres plus intimistes. À travers une interview exclusive, l’artiste nous ouvre les portes de son univers artistique.

 

 

Mon souhait c’est de pouvoir surprendre, faire plein de différents personnages pour raconter de belles histoires.

 

Bonjour Nicky. La Mémoire dans peau, Les rivières pourpres, Hitman, Arsene Lupin, ou encore À bout portant, vous êtes un acteur habitué aux rôles physiques et menaçants. Comment décririez-vous vos personnages ?

Comment les décrire ? Vous venez de le faire pour moi, ils sont effectivement menaçants, souvent experts dans les sports de combat, se sont des tueurs au sang froid. La difficulté quand on fait ce genre de personnages qui se ressemblent, c’est de leurs donner malgré tout une différence, notamment dans leurs façons de se battre mais aussi dans leurs attitudes. Il est très difficile de leurs donner un aspect humain quand on a aussi peu de temps pour les faire exister dans cette configuration. Cela dit, c’est une motivation du réalisateur et de ce genre de personnages, qui laisse peu d’oxygène à une palette d’émotions. Ils sont froids, violents, professionnels comme peuvent l’être ce genre de tueur à la solde. Celui que j’ai préféré incarner, c’est « Théophraste Lupin », le père d’Arsene qui m’a permis d’avoir plus de temps pour apporter plusieurs couleurs, plus d’ambiguïté au caractère. Une autre difficulté dans ce genre de personnage c’est de ne pas tomber dans le cliché et la caricature du méchant, il faut reste sobre tout en les rendant spectaculaire.

Depuis quelques temps, on vous retrouve dans des comédies plus dramatiques. C’est notamment le cas dans Je suis le partage de la cigogne, un court métrage Nikon Film Festival réalisé par Mickael Cohen. Ce film traite de nombreux sujets actuels tels que l’adoption, la gestation pour autrui ou encore l’envie et la possibilité de donner la vie. Est-ce vers ce vers ce registre plus sombre que vous souhaitez désormais vous tourner?

Vous savez, ce souhait je l’ai depuis toujours et quand on observe ma carrière de plus près, on s’aperçoit que j’ai fait un panel de personnages avec différentes couleurs notamment dans des films comme « Par Amour » de Laurent Firode ou encore dans « Les reines du ring » de Jean-Marc Rudnikki. Le problème c’est qu’en France, on a la fâcheuse tendance à vous cataloguer, quand vous êtes bon dans quelque chose, les gens vous cantonnent dans le même registre, ça met un certain temps pour les convaincre du contraire. Les rôles physiques  m’ont non seulement permis de me faire connaître, mais ils m’ont également pénalisé quand à une idée trop reçue sur mes capacités à interpréter des rôles différents que ceux qui m’ont fait découvrir. Aujourd’hui, j’ai pris aussi de la bouteille, il faut que j’en profite encore un peu si des rôles physiques se présentent à nouveau car d’ici quelques années je ne pourrais plus les faire. Donc pour répondre à votre question, mon souhait c’est de pouvoir surprendre, faire plein de différents personnages pour raconter de belles histoires…

Comédien mais également cinéaste, vous avez réalisé en 2014 un court métrage intitulé Retrouvailles. Ce drame urbain met en lumière le combat personnel d’un homme qui tente de se reconstruire après plusieurs années de détention. Comment est née l’idée de ce scénario très humain ?

Cette histoire est inspirée d’un scénario de long métrage que j’ai écrit. J’avais envie de faire un court métrage tiré de ce script. Il y avait, je ne vous cache pas, un désir de promouvoir le scénario du long, faire comme un gros teaser pour allécher les producteurs. Dans le scénario du long comme ce que l’on peut apercevoir dans le court, je parle d’une histoire de famille qui évolue dans le gangstérisme. J’évoque la rédemption d’un homme qui désire s’en sortir et qui se fait rattraper par son passé. Dans le long, je développe différents sujets en parlant avant toute chose de la famille avec pour toile de fond du monde de la voyoucratie. Mais avant tout c’est une histoire de femmes et d’homme déchiré.e.s par le milieu dans lequel ils évoluent. Il y a aussi un parallèle avec les anciens voyous que l’on appelle « Les beaux mecs » et la nouvelle génération comme ceux que l’on voit notamment évoluer dans les quartiers nord de Marseille, des jeunes beaucoup plus impulsifs et imprévisibles aux méthodes parfois radicales et sans vraiment de codes. À aucun moment je ne désire faire l’apologie du crime, bien au contraire, je montre à quel point s’il on décide de vivre ce genre d’existence, l’issue est souvent fatale pour ne pas dire dramatique, un peu comme je l’avais fait dans mon premier court métrage « L’ancien », où je parlais de l’addiction à l’alcool qui ne laissait pas non plus beaucoup de chance de s’en sortir.

 

 

  Le court permet beaucoup plus de liberté d’expression, plus de permission.

 

 

Le court métrage reste aujourd’hui encore, un format trop peu connu du grand public. Comment percevez-vous ce genre cinématographique très spécial et jamais à court d’idées?

C’est une expression et un format indispensable pour raconter par la suite des choses plus grandes. Tous les réalisateurs sont passés par cet exercice difficile, car quand on a peu de temps pour montrer les choses, c’est bien plus compliqué de les exprimer. Ce que j’aime aussi dans le court c’est que l’on a beaucoup plus de liberté d’expression, plus de permission, quand on passe au long il y a souvent certaines restrictions par les producteurs, les distributeurs, par toutes les personnes qui vous donnent les moyens pour réaliser votre film, ce qui malheureusement fait que certains réalisateurs ne font plus tout à fait le film qu’ils avaient en tête au départ. C’est dommage que l’on ne fasse pas dans les salles de cinéma comme fut à une époque, au siècle dernier, où il y avait toujours avant un court projeté avant le long que l’on venait voir, ça permettait au public de découvrir les futurs réalisateurs de demain. Pour ma part, je ne me lasse pas de découvrir dans les festivals ces petits films qui regorgent d’idées et de talents.

Quel(s) rôle(s) rêveriez-vous d’incarner à l’écran ? Et pourquoi ?

Ça c’est une question très difficile car il y a tellement de rôles que j’aimerai incarner, que je ne sais pas par lequel commencer précisément. Disons que je vais vous citer certains personnages comme celui notamment de Patrick Dewaere dans « Série Noire » d’Alain Corneau, ou celui d’Al Pacino dans « Un après-midi de Chien » de Syney Lumet, ou encore celui de Clint Eastwood « La route de Madisson », Steve McQueen dans « Papillon », Jack Nicholson dans « Vol au dessous d’un nid de coucou » de Milos Forman, Benecio Del Toro dans « Las Vegas parano » de Terry Gilliam, Michel Serrault dans « Garde à vue » de Claude Miller, bon je m’arrête là car la liste est bien trop longue, mais voilà tout du moins déjà une idée de tous les différents rôles que j’aimerai interpréter.

Quels sont vos projets à venir ?

Actuellement je suis dans la série Suédoise « Spring Tide » qui passe sur 13ème Rue. Je ne peux pas trop parler de mon personnage qui dévoilerait une trop grosse partie de l’intrigue, disons que c’est un personnage inquiétant dans lequel je me suis régalé. C’était une très belle expérience avec des gens aussi charmants que professionnels et avec cet univers que les scandinaves savent si bien faire. C’est une série adaptée d’un livre comme pour « Millénium ». Quant au reste, je ne me prononce pas encore, ce sont des métiers qui malheureusement tant qu’on n’a pas signé un contrat, on n’est jamais certain de les faire, donc je m’abstiendrai dans dire d’avantage pour le moment, mais je reste ouvert aux propositions…

Si vous deviez définir votre univers en un mot, lequel serait-il?

Ténacité.