Il est gore, drôle, sombre et totalement décalé. Vous l’aurez sans doute deviné, on veut évidemment parler de Wild Love, l’irrésistible film d’animation actuellement en lice pour les Oscars 2021. Pour en savoir plus, nous sommes allés à la rencontre de Paul Autric, Maryka Laudet et Quentin Camus, les jeunes réalisateurs de ce véritable bijou horrifique. Découverte.
Comment est né ce scénario à la fois trash, sombre et décalé ?
Wild Love est venu d’une envie commune de faire rire le public en racontant une histoire décalée, avec un twist sombre et gore. L’idée de base est venue d’une blague entre nous, et on a commencé à s’imaginer les choses délirantes qui pourraient arriver si des rongeurs mignons se transformaient soudainement en tueurs sanguinaires. La machine était lancée !
En parallèle de ça, un autre désir qui nous a fédéré en tant qu’équipe, était celui de raconter une histoire pour adultes en utilisant l’animation, et d’aller à contre-pied de cette idée reçue et très populaire que l’animation est un genre destiné aux enfants. Nous croyons sincèrement que l’animation n’est pas un genre en soi, mais un fabuleux outil permettant de raconter toutes sortes d’histoires, et c’est aussi pour cette raison que nous avons décidé de poursuivre cette idée loufoque.
Vos films sont souvent fun, colorés, mais rarement horrifiques. Pourquoi avez-vous choisi ce genre cinématographique ?
Le genre horrifique s’est simplement imposé à nous, car c’était le meilleur moyen de raconter cette histoire avec humour. Une grande part du potentiel comique réside dans le clash entre horreur et ridicule, et c’est cette veine que nous avons décidé d’exploiter. On a voulu utiliser le genre horrifique comme vecteur de comique, et nous avons toujours été vigilants lors de la phase d’écriture à ne jamais tomber dans l’horreur pure : il y a en effet certains passages extrêmement gores et violents dans le film, mais ces moments d’horreur devaient toujours provoquer le rire.
À travers son irrésistible humour noir, Wild Love brise les codes de l’horreur. On note une certaine ressemblance avec Shaun Of The Dead d’Edgar Wright, n’est-ce pas ?
C’est en effet un film qui nous a inspiré, il y a quelque chose de très intéressant à installer de l’humour dans de l’horreur, et Shaun of the Dead parvient à le faire avec génie. Edgar Wright joue aussi beaucoup avec le mélange des genres et c’est quelque chose qu’on a choisi de faire également en mêlant une comédie romantique à un film d’horreur.
Une certaine distance est créée pour permettre de rire de ce qu’il se passe à l’écran, aussi gore et cruel que ça puisse être. On voulait atteindre cette même distance dans Wild Love pour rendre le rire possible. Dans notre cas, c’est passé par créer d’un côté un couple très agaçant et de l’autre, une menace face à eux complètement invraisemblable : des marmottes sanguinaires.
Peut-on dire que ce court métrage dénonce, d’une certaine façon, la prédominance de l’Homme sur les animaux ?
Nous n’avons pas vraiment écrit le film avec le but d’y intégrer une morale, le but premier était surtout de faire un film drôle et insolent. Mais c’est vrai que d’autres niveaux de lecture se sont dévoilés au fur et a mesure de la conception du film, et on assume totalement le fait que Wild Love puisse être lu comme un film à message : nous ne sommes pas tout-puissants, et la nature reprend toujours ses droits.
Cette escapade romantique se transforme en randonnée meurtrière à cause d’un simple selfie. Est-ce une manière de témoigner de l’omniprésence du numérique dans notre société ?
On n’a pas non plus fait le choix de dénoncer particulièrement la présence du numérique, mais il est vrai qu’on entend souvent parler d’accidents à cause de selfies en altitude, ce qui paraît assez stupide, et on a voulu jouer avec ça.
Pour nous, Alan et Beverly représentaient vraiment l’archétype du couple parfait des réseaux sociaux : ils sont beaux, amoureux, ils partent en vacances, ils se prennent en selfie. Ils cultivent surtout l’image d’un amour parfait, mais quand le danger survient, on se rend compte qu’il n’y a pas grand-chose derrière.
De nouveaux projets à venir ?
Paul : je poursuis actuellement ma carrière d’animateur chez The Mill, un grand studio londonien, j’ai donc la chance de participer à une multitude de projets différents. Je travaille aussi personnellement sur le développement de nouveaux projets en réalisation et en écriture, affaire à suivre !
Maryka et Quentin : on continue de travailler ensemble tous les deux. Après avoir goûté à la réalisation sur Wild Love, notre première envie était de raconter d’autres histoires. On est maintenant réalisateurs chez Passion Pictures. On réalise des pubs et des courts métrages et on réfléchit activement à des projets plus longs, ça nous plairait beaucoup de faire une série !